Cela fait déjà un petit moment que je me balade dans le milieu des vins naturels, ce qui fait quelques visages croisés de ci, de là. Des visages qui se mélangent, des personnes qu’on a du mal à « remettre » quand on les voit, des regards qu’on croise et qui sont aussi perdus que moi en me voyant !
Frédéric était de ceux-là il y a peu, ou plutôt non, Frédéric Agneray fait plutôt parti de ceux avec lesquels on a eu un bon moment d’échange et qu’on a perdu de vue… jusqu’à se recroiser un jour !

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Février 2009 (ou 2010 je sais plus trop), Salon des vins de Loire – Angers

C’est dans ce salon où beaucoup de jeunes vignerons de Loire, adeptes des vins naturels, présentaient leur production avant que les salons off ne prennent le pas. Là on trouvait quelques énervés… le domaine de la Grange aux Belles en tête. C’est sur ce stand que j’ai fait connaissance avec Frederic Agneray, alors en formation viti-oeno et en stage chez Julien Bresteau et Marc Houtin. Tout de suite le courant passe avec ce mec humble, calme, intelligent dans son approche des choses. On discute, on échange, moi qui cherche à démarrer une activité dans le vin et lui qui apprend le métier. Quoi faire après la formation ? Voyager, voir des domaines, s’installer ? Mais où ? l’Anjou ? le Muscadet ? Bref un bonne discussion m’a permis de voir que déjà Frédéric menait bien sa barque, sans oeillère, lui qui avait trainé ses bottes au Clos Rougeard durant sa formation !

Juin 2015, portes ouvertes de La Grange aux Belles !

Discussion au téléphone avec Julien Bresteau, au sujet des vignerons invités pour fêter les 11 ans du domaine : « ah puis si y a Fred notre premier arpette qui s’est installé dans le Gard et nous remonte son premier millésime. J’ai pas goûté mais connaissant le gars ça devrait être bon ! ». Ah bien ! Fred, un gars formé en Loire et qui fait des vins naturels dans le sud, faudra que je goûte !
Arrivé le jour J et pas particulièrement studieux vu l’ambiance, je me laisse porté par l’après-midi, puis fini enfin par aller goûter. Ah oui c’est vrai faut que je goûte le gars du Gard ! Je m’approche du vigneron et là évidemment cette phrase passe dans ma tête « ah merde il me dit quelque chose lui ! ». C’est pénible de ne pas se souvenir, surtout quand on a la sensation de déjà beaucoup apprécier le mec ! Bref il me sert un verre : « ça c’est ma toute première cuvée, c’est en bouteille depuis peu, Grenache avec un tout petit peu de Syrah, c’est Kalamite ». Je goute : « la vache c’est bon, c’est net, droit, sérieux, juste ce qu’il faut de fruit pour le plaisir et de fraicheur aussi ! Mais bon sang pourquoi je le connais ce vigneron ? ».

Et l’arpette a fait son bonhomme de chemin…

Frédéric termine de faire goûter mes prédécesseurs et nous pouvons alors discuter un peu ! « Alors comme ça t’a fait ton stage ici ? » c’est à ce moment là que ça fait tilt dans ma tête ! « Ah mais oui ça y est je me souviens quand tu étais chez eux, on avait bavardé au salon des vins de Loire, ah bein c’est cool de voir que tu t’es installé ! ». Et Fred de répondre « oui moi aussi il me semblait bien qu’on se connaissait ! Bein oui finalement c’est dans le Gard que j’ai pris des vignes ! ». Et c’est ainsi que je découvre son périple, passage à Condrieu, au domaine Mas de Libian et puis l’opportunité de reprendre des vignes dans le Gard, du côté de Bagnole sur Cèze. Frédéric Agneray travaille seul ses 3 hectares, directement passés en bio et avec la biodynamie en ligne de mire. Un vignoble en assez bon état mélangeant Grenache et Syrah, jeunes vignes et parcelles plus âgées.

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Avancer pas à pas !

Frédéric Agneray le sait, dans la vigne comme ailleurs, les choses mettent du temps à se faire. Le chai n’est pas encore à son goût mais il viendra le moment où il pourra s’équiper correctement. Aujourd’hui l’heure est plutôt à la mise en route du domaine, à la remise en état de ses vignes, à l’activation de la vie de ses sols et à la découverte de ses terroirs si spécifiques. Des terroirs où l’acidité est très présente et apporte une fraicheur salvatrice dans les vins, des sols de sable et de calcaire plutôt pauvres. Et puis il faut apprendre les spécificité du climat méditerranéen, comprendre comment lutter contre une maladie moins menaçante dans le nord : l’oïdium. Autant d’éléments qui vont faire avancer le vigneron et avec lui ses vins, j’en suis certain.

Kalamite et les Larrons, deux cuvées pleines de promesses…

Si ce n’est la pression d’oïdium assez tenace, pour son premier millésime l’année 2014 aura été assez clémente. Elle a donné naissance à 2 cuvées Kalamite et Les Larrons. La première a pour vocation d’être glouglou, facile d’accès, des jeunes vignes de Grenache en très grande majorité, un mélange de vinification traditionnelle, de macération carbonique et de pressurage direct ! Une expérience empirique pour ce premier jet qui a bien tourné et qui constituera sûrement les bases de la recette de cette cuvée pour quelques années. L’esprit des Grenaches de l’Anglore plane ! Avec les Larrons on passe dans une ambiance plus sérieuse, l’objectif est plus d’aller chercher la finesse et l’élégance du Rhône Nord. Très majoritairement Syrah, cette cuvée est vinifiée de manière traditionnelle, avec une macération courte, sans recherche d’extraction. Un élevage lui aussi court en barriques… du Clos Rougeard évidemment (chose qui évoluera certainement avec le temps). A noter que pour les deux cuvées, Frédéric souhaite réaliser des élevages courts et une mise en bouteille précoce, prenant le pari que le vin se fait aussi dans la bouteille.

De belles promesses à venir et un domaine à suivre de très près… nous on le lâche pas !